La passion très gourmande de Pierre Marcolini





Sébastien – Bonjour ici Sébastien du site internet Chococlic.com. Aujourd’hui j’ai le plaisir d’accueillir et d’être dans les laboratoires de Pierre Marcolini, directement à Bruxelles. Bonjour Pierre.

Pierre Marcolini – Bonjour Sébastien.

Sébastien – Je te remercie. Je pense qu’on va passer un moment intéressant.

Pierre Marcolini – Avec plaisir.

Sébastien – à te découvrir en profondeur.

Pierre Marcolini – J’espère !

Sébastien – Pour commencer, moi j’aimerais que tu racontes un peu ton histoire, parce que tu as un parcours assez atypique. Tu as fait beaucoup de choses. Par où et par quoi tu es passé et pourquoi le chocolat ?

Pierre Marcolini – D’abord un tout grand merci du déplacement parce que ce n’est pas la porte à côté. C’est Bruxelles. Même si l’Europe est petite, il faut quand même venir jusqu’ici. La deuxième chose, pour revenir à ta question, c’est qu’effectivement, le parcours, d’habitude, quand on est chocolatier comme je le suis aujourd’hui, on a toujours tendance à croire qu’il y a d’abord une famille derrière, il y a un père, une grand-mère qui faisait des gâteaux etc. Rien de tout ça. Mais alors absolument rien. Pour être très clair, ma mère avait tendance à très mal cuisiner donc ça ne vient pas de là. Les gâteaux n’étaient pas forcément légion à la maison pour des raisons financières. Mais par contre, tout petit, je fais un aveu – j’avais tendance à manger deux desserts à la place d’un seul. Moi j’étais capable de manger un, deux voire trois desserts sans aucun problème et la partie salée m’intéressait moins, par goût, par envie, par gourmandise. Alors, comme les belges ont toujours un peu une espèce d’autodérision, je dirais que j’ai fait ce métier parce que ça me coûtait une fortune d’acheter toujours des desserts, mais ce n’est pas vrai. Ce n’est pas évidemment ça.

Par contre, pour revenir à une chose plus sérieuse, dès l’âge de 9/10 ans c’était vraiment quelque chose qui m’a séduit, qui m’a passionné. Il y a des choses qui ont fait que je suis rentré plus en profondeur dans le métier de pâtissier et de chocolatier. C’est à la fois la télévision scolaire à l’époque – puisque j’ai 50 ans. Il y a une époque où à l’école on regardait la télévision scolaire qui était sur des thèmes bien précis et on voyait le métier de pâtissier. J’étais aussi dans des mouvements de jeunesse en tant que louveteau et scout et je me suis retrouvé à quatre cinq heures du matin dans ces ateliers-là. J’ai vraiment été séduit par cet univers et puis à l’âge de 14 ans pour faire bref, je suis allé voir ma mère. Je lui ai dit : « Écoute, je veux devenir pâtissier-chocolatier. » Elle m’a regardé, elle m’a dit : « Ce n’est pas possible. » Parce que pâtissier-chocolatier c’est ce qu’on appelle un peu l’école de la dernière chance, comme en France. L’enseignement technique et professionnel on se dit non ce n’est pas possible. On veut que mon fils devienne universitaire et là je lui annonce que je ne veux pas du tout et que je veux tout de suite aller à la case la plus basse possible au niveau de la société. Donc ce n’était pas tenable pour elle et elle m’a dit : « Tu choisis un métier facile. » Puis je suis arrivé dans cette école qui était célèbre à l’époque, le Ceria, qui était une école d’hôtellerie etc., et puis dès le départ je suis rentré dans ces classes professionnelles avec les odeurs, avec les cours pratiques etc., et je me suis dit : « Je suis bien. »

Tu vois, comme à un moment donné tu sais que tu es tombé amoureux, tu ne sais pas pourquoi mais tu sais que c’est ça. Tu as cette conviction profonde de te dire, voilà j’ai trouvé ma voie, j’ai trouvé ma passion. Je sais que ce n’est pas simple pour des jeunes, parce qu’il y a parfois des jeunes – j’ai un fils – qui sont un petit peu perdus, qui se disent : « Mais qu’est-ce que je vais faire dans ma vie » etc. Pour moi c’était une espèce d’évidence de me dire que je veux devenir pâtissier-chocolatier, je trouvais qu’il y avait une magie de prendre des ingrédients comme ça, de les mélanger et de sortir autre chose. En plus la notion de plaisir, la notion de dégustation, de nouveau ces notions de gourmandise et donc j’ai commencé ce métier à l’âge de 14 ans. J’ai fait un cursus assez normal dans cette profession, c’est-à-dire d’abord de savoir ce que je voulais et puis de faire des grandes maisons.

Mon fil rouge, c’était vraiment la notion de qualité. Mais même avec ces notions de qualité qui pouvaient parfois avoir une certaine forme d’arrogance, parce que je rentrais dans des maisons, fin des années 70 et puis dans les années 80, il y avait encore cette espèce de dénonciation du beurre. Il était hors de question de parler de beurre. On parlait de cholestérol etc., donc on avait remplacer ça par de la margarine qui était complètement infecte pour moi, ça c’est clair. Donc je suis tombé dans des maisons où on commençait à travailler avec des produits semi-finis. De la poudre, de l’eau et on faisait de la crème pâtissière en deux minutes. Le chocolat c’était pareil. Tous ces ingrédients un peu nobles étaient un peu au profit de la rentabilité. Quand je parlais un petit peu d’arrogance, je me souviens que je suis rentré dans des maisons où je ne faisais qu’un jour d’essai et puis le patron me disait : « C’est bien, on vous engage. » Et puis moi je m’étais rendu compte que la qualité n’était pas au rendez-vous. Donc je lui disais : « Non, écoutez, je suis désolé, je ne vais pas rester. » Il me regardait et me disait : « Quoi ? Le salaire, l’horaire ? ». Je disais : « Non, le produit. » Déjà cette notion du produit.


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