La chocolaterie de l'Opéra dépasse les limites de la torréfaction du Cacao





Sébastien – Par rapport à la création, par rapport à différentes générations, là, vous êtes allés encore plus loin, au niveau de la torréfaction.

Olivier – Comme on l’a dit la fève de cacao c’est le fœtus, c’est le fruit, tout vient de la fève de cacao. Ceci dit il y a des transformations entre le moment où la fève de cacao est récoltée et le moment où elle rentre dans la composition d’un chocolat. Il y a deux étapes sur lesquelles l’homme façonne le goût. La première étape c’est la fermentation. Il y a dans les pays producteurs une fermentation de la fève de cacao ; autrement dit ce que nous recevons ce n’est pas une fève fraîche, c’est une fève qui a été fermentée. Là, le savoir-faire du cultivateur, le savoir-faire du paysan est très important. Comme dans le vin. À nous de choisir, à travers les voyages que nous évoquions, les endroits où le terroir et la fermentation sont bien faits. Une fois que cette chose est acquise, qu’on a une fève de cacao que nous trouvons originale, bonne et surtout avec une grande capacité aromatique, faut-il encore que la dernière étape humaine avant le chocolat, qui est, en termes de goût, la cuisson c’est-à-dire pas autre chose que la torréfaction, faut-il qu’elle soit réussie. La cuisson d’une fève de cacao c’est la cuisson en grande cuisine. Il y a depuis des millénaires des évolutions sur le type de cuisson, sur l’énergie employée, sur les méthodes, les temps, la basse température en cuisine c’est quelque chose de relativement nouveau, à l’échelle du monde. Et bien on s’est posé la question de savoir si, alors que la torréfaction classique c’est : monter à une certaine température, cuire et que la température redescende, s’il n’y avait pas une autre méthode pour essayer de restituer dans le chocolat, ces arômes que la nature a créés, parce que les torréfactions classiques ont tendance, de par leur puissance, à masquer, à couvrir. Donc, sans aucune prétention on s’est dit, on va essayer de découvrir la phase cachée du chocolat ; celle que la torréfaction classique cache mais qui est encore contenue dans le chocolat. Alors on a développé une nouvelle méthode de torréfaction. Cette méthode s’appelle séquencia. C’est une torréfaction séquentielle, c’est-à-dire qu’au lieu de cuire en continu, on fait des séquences de cuisson qui, additionnées l’une à l’autre vont finir par faire une torréfaction totale mais qui est cadencée, basée sur des cycles et sur une maîtrise assez particulière des températures et des temps. Pourquoi ? Parce qu’il faut essayer d’équilibrer les trois arômes qui composent le chocolat. Quels sont ces trois arômes ? L’arôme du fruit, ça c’est la nature. L’arôme de la fermentation, c’est l’arôme du paysan et de l’homme et l’arôme de la torréfaction c’est l’arôme du transformateur.

Sébastien – C’est là que toi tu interviens justement sur l’arôme de torréfaction avec les différentes cuisson.

Olivier - Exactement puisque nous recevons les fèves et que notre métier est de faire du chocolat après. La torréfaction c’est l’acte de naissance final de l’arôme du chocolat. Après, on mélange mais on ne crée plus d’arôme. Donc à la sortie de la torréfaction, l’arôme est né. On peut peut-être être pas très très bon et le maltraiter mais en tout état de cause on ne peut plus le réélever. Le maximum est là.

Sébastien – Oui, le maximum a été acquis.

Olivier – Donc il faut que ce soit le maximum. Cette nouvelle technologie qui est je pense vraiment une réelle première mondiale, c’est une technologie qui est un autre point de vue, révélatrice de l’équilibre qu’on peut obtenir entre ces trois arômes qu’a le chocolat : l’arôme du fruit, de la fermentation, puis l’arôme de la torréfaction. Moi j’aime bien l’expression face cachée du chocolat, parce que ça existait. On ne rajoute rien. Ce n’est pas des nouveaux goûts parce qu’on met de la poudre de perlimpinpin, c’est simplement qu’on fait une radiographie, on fait un scan. Avant on faisait de la radio maintenant on fait un scan.

Sébastien – Toi tu penses que – parce que là c’est vraiment dans les débuts même si ça fait quand même quelques années que tu me disais que tu travaillais déjà dessus. J’imagine que tu ne vas pas être au bout de tes surprises avec les différentes variétés ?

Olivier – Ça va être une gamme qui va être, pour nos clients professionnels, une gamme à part. On ne va pas faire cette méthodologie pour tous nos produits. Tu as vu les codes chocolats sont un tout petit peu bouleversés. Ce n’est pas un chocolat traditionnel. On découvre des arômes que nous connaissons mais que le consommateur final ne connaît pas, parce qu’ils étaient cachés justement. Donc on fait ce développement qui est maintenant bien engagé puisque tu as goûté des produits réalisés avec cette méthode. On va continuer à travailler. Il y a déjà beaucoup d’années de recherche sur cette méthode. On va continuer. On va sans doute développer la gamme. Ça va aussi dépendre évidemment de la réponse du marché. Si nos clients professionnels nous disent : « Oui, très bien mais je n’aime pas trop. » Ça va clôturer le débat. Mais tu as vu que tout ce qu’on a pu avoir comme retours c’étaient des retours positifs. On n’aime pas dans la chocolaterie de l’Opéra la prétention de dire qu’on est des envoyés du Christ, qu’on a inventé le meilleur chocolat du monde, etc. Ce n’est pas le cas. On essaye d’avancer. On essaye surtout de faire du différent. C’est acquis que c’est très différent. Ensuite, comment les professionnels d’abord puis leurs clients vont réagir à ça et bien on va le voir. On est évidemment très confiants mais ça s’adresse évidemment à une élite. Ça ne peut pas être un produit de grande consommation.

Olivier de Loisy et Sébastien Rivière©ChocoClic


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